La vie après les courses

Connue sur les réseaux sociaux sous le nom de « Francis, Marley et moi », Julie Gandelheid eu un véritable coup de foudre pour Feu Francis, un AQPS de 4 ans, anciennement entraîné par Philippe et Camille Peltier. De leur rencontre à leur découverte mutuelle, Julie nous livre leur histoire.

• Pourquoi avoir fait appel à une association de reconversion ?
  
  Fin 2019, j'ai réalisé mon rêve d'enfant d'acquérir un cheval pour former une équipe. J'ai essayé quelques chevaux « selle français », mais sans succès. La réussite de cavaliers renommés avec d'anciens chevaux de course dans le concours complet ont attiré mon attention. Comme Clara Loiseau et Wont Wait qui se sont illustrés au Badminton Horse Trials en 2019, l'un des six concours complets les plus prestigieux au monde.
  
  J'ai donc cherché sur internet des chevaux en reconversion et j'ai trouvé la page d'Écurie Seconde Chance. Feu Francis, un AQPS de 4 ans, m'a tout de suite attirée avec sa tête adorable et ses traits fins, même si son nom est un peu particulier (rires). J'ai rapidement contacté Sylvain Martin, le fondateur de l'écurie, avec de nombreuses questions. Et 48 heures plus tard, je me rendais chez Francis.
  
  Ce 28 février 2020, je m'en souviens comme si c'était hier : il faisait un froid glacial et Francis était bien emmitouflé dans une énorme couverture intégrale. Après l'avoir essayé pendant deux tours, j'ai été conquise. Je suis ensuite retournée pour un deuxième essai afin de confirmer mes premières impressions.
   
• Selon vous, est-il nécessaire de bien connaître les chevaux avant d’accueillir un cheval reconverti ?
  
  Pour réussir, il faut avoir les moyens financiers et l'entourage adéquat, surtout lorsque l'on est amateur. Ces chevaux ne sont pas physiquement prêts à répondre immédiatement aux attentes des cavaliers. Parfois, cela entraîne des échecs, bien que ces chevaux aient un grand cœur. Il faut comprendre qu'ils n'en ont pas encore les capacités.
  
  Personnellement, je partais de zéro, mais avoir Francis à mes côtés me suffisait. J'ai découvert son passé, son élevage, son entraînement, etc. Une équipe s'est progressivement formée autour de nous, comprenant notre maréchal, notre physiothérapeute, notre vétérinaire, le Haras des Flambertins où vit Francis, la balnéothérapie, et nos partenaires. Ensemble, nous avons développé l'idée et j'ai lutté pour que l'Écurie Seconde Chance en tire bénéfice.
   

  

   

• Comment était Francis lors de vos débuts et comment est-il aujourd’hui ?
  
  Francis était initialement peu expressif et nous n'avions pas de véritable contact. Cependant, je n'étais pas trop inquiète, car je n'avais pas de référence pour comparer. J'ai investi beaucoup de temps à pied avec lui, même à faire du jogging, ce qui surprenait beaucoup de gens. Grâce à l'approbation de l'équipe, à mon écoute attentive de mon cheval et à une découverte progressive, j'ai appris à le connaître très intimement.
  
  Il a adhéré à mes propositions et prend du plaisir à les suivre. Je peux également reconnaître quand il n'est pas motivé. Je suis convaincue qu'il apprécie sa vie : il est joueur, vif et notre interaction est évidente. Aujourd'hui, Francis a complètement changé. Je le compare souvent à une petite crevette devenue un homard ! Il est heureux de vivre, et je veux maintenir cette joie. Son bien-être passe avant le mien, c'est une évidence.
  
  Il est important de comprendre que même si l'amour était présent dès le début, il faut du temps pour construire cette relation solide.
   
• Jusqu’où êtes-vous allés tous les deux en concours complet ?
  
  Dans le concours complet, les catégories vont de l'amateur 4 à l'élite, puis aux professionnels. Après un an et trois quarts de pratique, nous avons atteint le niveau amateur 3. Nous avons même participé à une épreuve de "115" à Jardy, une hauteur réservée à la catégorie "amateur élite". C'était une première pour nous deux ! J'ai l'impression qu'avec lui, rien n'est impossible, qu'il est capable de me donner tout ce dont j'ai besoin. Cela me procure d'ailleurs un excès de confiance (rires) !
  
  J'espère qu'à l'âge de 15 ans, nous pourrons participer à un concours international de niveau élite. Des cavaliers de l'équipe de France m'ont dit qu'il en avait le potentiel. C'est devenu un petit rêve pour moi
   
• Quel message souhaitez-vous faire passer sur les réseaux sociaux ? Qu’aimerez-vous que les gens retiennent de votre aventure avec Francis ?
  
  Je suis déterminée à représenter fièrement ces chevaux exceptionnels à qui nous offrons une vie après les hippodromes. Je ne suis pas à la recherche de popularité ou de partenariats, mais c'est grâce à Francis que j'ai trouvé la force de mener ce beau projet ! Je souhaite être transparente sur notre expérience pour éveiller les consciences et changer l'image des chevaux de course dans leur reconversion. J'ai moi-même essuyé des critiques lorsque j'ai acheté Francis, des personnes dans le milieu équestre me disaient : "Tu ne devrais pas acheter un cheval de course, tu ne pourras rien en faire !" Aujourd'hui, Francis prouve le contraire en devenant l'ambassadeur d'Écurie Seconde Chance. Depuis notre histoire, quinze chevaux comme lui ont été adoptés !
  
  Parmi ceux qui suivent notre aventure, beaucoup m'écrivent pour me dire qu'ils ont changé d'opinion sur les chevaux de course. Récemment, j'ai réalisé un sondage dans une story : sur les 1 300 personnes qui y ont participé, 720 étaient d'accord pour envisager l'adoption d'un cheval de course réformé. Je m'efforce également de mettre en avant de nouvelles histoires, de nouveaux duos qui se forment. Les gens se disent désormais : "C'est possible !" Et en effet, c'est possible, mais voici ce qu'il faut savoir pour ne pas passer à côté de belles histoires. Les humains doivent être prêts à écouter et à patienter.
  
  En conclusion, je peux vous dire qu'il n'y aura pas d'autre cheval après Francis. J'espère de tout cœur qu'il vivra le plus longtemps possible, car il est le cheval d'une vie.